CSRD 2026 : Comment se préparer au reporting de durabilité et au Bilan Carbone obligatoire

Les points clés à retenir

La CSRD (Directive 2022/2464) marque une transformation majeure du reporting des entreprises, en imposant une analyse de double matérialité et le respect des normes ESRS, avec ESRS 2 obligatoire pour toutes les entités. Le pilier climat (ESRS E1) rend la mesure complète du Scope 3 indispensable, ce qui justifie l’adoption de méthodologies robustes comme le Bilan Carbone (ADEME). Avec les ajustements apportés par le paquet Omnibus, les ETI dépassant les nouveaux seuils (25 M€ de bilan ou 50 M€ de chiffre d’affaires) seront concernées dès 2027. Face à la complexité du reporting et à l’obligation d’assurance par l’OTI, l’anticipation de la collecte de données via des solutions logicielles spécialisées (SaaS) devient essentielle, permettant non seulement de garantir la conformité, mais aussi de transformer la CSRD en un véritable levier stratégique pour piloter et optimiser la performance ESG.

Qu’est-ce que la CSRD et pourquoi constitue-t-elle un pilier méthodologique majeur ?

La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) marque une étape décisive dans l’évolution du reporting extra-financier en Europe. Adoptée en décembre 2022 par la Directive 2022/2464, elle renforce et harmonise les informations de durabilité que les entreprises doivent publier.

Cette nouvelle réglementation s’inscrit pleinement dans l’ambition du Pacte Vert européen et dans la volonté d’aligner les acteurs économiques sur les objectifs de l’Accord de Paris : maintenir l’augmentation des températures bien en dessous de 2 °C et poursuivre les efforts pour limiter le réchauffement à 1,5 °C.

Avec la CSRD, l’enjeu est clair : fournir aux investisseurs et aux parties prenantes des données de durabilité plus comparables, plus fiables et vérifiables, afin de mieux piloter la transition écologique et d’améliorer la transparence des performances ESG des entreprises.

Définition et contexte réglementaire : Le passage de la NFRD à la Directive 2022/2464

La CSRD succède à la Non-Financial Reporting Directive (NFRD), qu’elle remplace en élargissant fortement le périmètre des entreprises concernées ainsi que les exigences de transparence. Adoptée en décembre 2022, elle est disponible dans les textes officiels de l’Union européenne via EUR-Lex.

Avec son entrée en vigueur progressive, la CSRD impose désormais aux entreprises de rendre compte non seulement de leurs performances environnementales et sociales, mais aussi de la façon dont leur stratégie anticipe les risques et les opportunités liés à la transition écologique.

Ce changement réglementaire majeur introduit de nouvelles obligations de publication, structurées autour des normes européennes de reporting de durabilité (ESRS). Celles-ci couvrent l’ensemble des trois piliers du développement durable : l’environnement, le social et la gouvernance (ESG).

Le pilier de la CSRD : L’analyse de double matérialité

L’analyse de double matérialité est le concept le plus important et le plus structurant de la CSRD. C’est une étape obligatoire pour élaborer un reporting conforme aux normes ESRS. Elle impose aux entreprises d’évaluer leurs enjeux de durabilité sous deux angles complémentaires :

  1. La matérialité d’impact (Inside-Out) L’entreprise doit analyser et rendre compte de ses impacts sur les personnes et l’environnement. Cela inclut, par exemple, la pollution, les émissions de gaz à effet de serre (GES), les enjeux de biodiversité ou encore les questions de droits humains.
  2. La matérialité financière (Outside-In) L’entreprise doit identifier comment les facteurs environnementaux et sociaux — tels que les risques climatiques, les évolutions réglementaires ou les coûts liés à la transition énergétique — peuvent générer des risques ou des opportunités financières pour son activité.

Concrètement, adopter cette double lecture signifie que le reporting ne peut plus se limiter au périmètre strict des opérations internes. L’analyse d’impact oblige les entreprises à examiner l’ensemble de leur chaîne de valeur, ce qui est particulièrement déterminant pour les enjeux climatiques.

Pour l’indicateur climatique ESRS E1, la double matérialité impose d’intégrer les émissions indirectes du Scope 3 dans le Bilan Carbone. Comme la majorité des impacts environnementaux et des risques de transition se situent dans la chaîne de valeur, une modélisation carbone complète devient indispensable.

En France, la méthode Bilan Carbone (ADEME) est souvent recommandée pour sa solidité, notamment sur le Scope 3. Toutefois, elle n’est pas la seule méthode acceptée : des cadres comme le GHG Protocol ou la norme ISO 14064 peuvent également être utilisés, à condition qu’ils respectent les exigences ESRS en matière de périmètre, de transparence et de traçabilité.

L’analyse de double matérialité devient ainsi le véritable fil conducteur du reporting CSRD. Elle permet d’identifier les enjeux suffisamment significatifs pour être intégrés au rapport de durabilité et, au-delà, sert de base pour orienter la stratégie d’entreprise à moyen et long terme.

La structure des 12 Normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards)

Pour assurer un reporting harmonisé et complet, la CSRD s’appuie sur les European Sustainability Reporting Standards (ESRS). Ces normes techniques ont été développées par l’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group), puis adoptées par la Commission européenne via un Acte délégué le 31 juillet 2023, avant leur publication au Journal Officiel le 22 décembre 2023.

La première série comprend douze normes ESRS, couvrant l’ensemble des enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Deux normes sont transversales, tandis que les dix autres sont organisées autour des trois piliers E, S et G.

Il est important de souligner que :

  • ESRS 1 (Exigences Générales) définit les principes du cadre mais n’impose pas de divulgations spécifiques.
  • ESRS 2 (Informations Générales à Publier) est obligatoire pour toutes les entreprises, sans exception.
  • Toutes les autres normes thématiques sont conditionnées par l’analyse de matérialité.

Dans les faits, pour la majorité des grandes entreprises, la norme ESRS E1 (Changement climatique) sera quasi systématiquement considérée comme matérielle, tant pour ses impacts que pour ses risques financiers. Cela entraîne une obligation implicite de publier des informations climatiques détaillées, et donc de préparer un jeu de données GES solide et vérifiable.

Qui est concerné par la CSRD et quels sont les seuils d’application mis à jour en France ?

La CSRD ne s’applique pas à toutes les entreprises en même temps. Son déploiement se fait progressivement afin de permettre aux organisations d’adapter leurs processus internes, notamment en matière de collecte des données et de gouvernance du reporting. En France, les seuils permettant de déterminer quelles entreprises sont concernées ont également été révisés, ce qui élargit ou précise le périmètre d’application.

Un calendrier d’application en trois vagues

La mise en œuvre de la CSRD, détaillée notamment par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF), s’organise en trois grandes étapes. La directive « Omnibus » adoptée en 2025, aussi appelée « Stop the Clock », a par ailleurs repoussé l’entrée en vigueur des Vagues 2 et 3.

  • Vague 1 : Exercices ouverts à partir du 1er janvier 2024 (publication en 2025) Cette première vague concerne les entreprises d’intérêt public (EIP) ainsi que les grandes sociétés cotées. Elles doivent dépasser en moyenne 500 salariés ainsi que deux des trois anciens critères financiers : un chiffre d’affaires net d’au moins 40 millions d’euros ou un total de bilan d’au moins 20 millions d’euros.

  • Vague 2 : Exercices ouverts à partir du 1er janvier 2027 (publication en 2028) Cette deuxième vague s’applique à l’ensemble des autres grandes entreprises, cotées ou non, dès lors qu’elles dépassent les seuils de taille actualisés par la législation française. Elle concerne notamment les ETI et les grandes entreprises non EIP.

Vague 3 : Exercices ouverts à partir du 1er janvier 2028 (publication en 2029) La troisième vague vise les PME cotées sur un marché réglementé. Elles bénéficient toutefois d’une option de report de deux ans, leur permettant d’appliquer la CSRD à partir de l’exercice 2030 seulement, avec une première publication en 2031.

Les Nouveaux Seuils d’Application en France suite au Décret 2024-152

La mise à jour des seuils de taille est l’un des points clés à connaître pour les directions financières et juridiques. Le Décret n° 2024-152 du 28 février 2024, applicable depuis le 1er mars 2024, a révisé les critères du Code de commerce pour intégrer l’effet de l’inflation. Ces nouveaux seuils concernent tous les comptes et rapports relatifs aux exercices ouverts à partir du 1er janvier 2024.

Cette révision est particulièrement importante pour les entreprises proches des limites réglementaires, notamment celles qui entreront dans la Vague 2 de la CSRD. Pour être considérée comme une Grande Entreprise et donc soumise à l’obligation de reporting dès l’exercice 2027 (publication en 2028), une société doit désormais dépasser deux des trois seuils suivants :

  • Nombre moyen de salariés : 250 (seuil inchangé)
  • Total de bilan : 25 millions d’euros (ancien seuil : 20 M€)
  • Chiffre d’affaires net : 50 millions d’euros (ancien seuil : 40 M€)

Cette augmentation peut permettre à certaines ETI situées juste au-dessus des anciens seuils de sortir temporairement du champ d’application immédiat, leur laissant plus de temps pour préparer leur futur reporting de durabilité. Pour connaître précisément son statut, chaque entreprise doit se référer aux valeurs mises à jour disponibles sur Légifrance.

Ce cadre révisé s’inscrit directement dans la lecture du calendrier CSRD et des critères applicables aux vagues 2 et 3.

Calendrier et Seuils d’Application de la CSRD (Synthèse des Vagues)

Vague d’Application

Type d’Entreprise Concernée

Critères Principaux (Décret 2024-152)

Début de l’Exercice de Reporting

Première Publication du Rapport

Vague 1

Grandes entreprises cotées (EIP)

>500 employés + critères financiers (anciens seuils)

1er janvier 2024

2025

Vague 2

Autres Grandes Entreprises (ETI non cotées)

>250 employés, et dépassement de 2 des 3 seuils : 25 M€ Bilan / 50 M€ CA net

1er janvier 2027

2028

Vague 3

PME cotées (sauf micro)

Petites et Moyennes Entreprises cotées

1er janvier 2028 (avec option de décalage de 2 ans)

2029 (ou 2031)


Un autre aspect essentiel de la transposition française concerne l’exigence d’assurance. Pour les entreprises de la Vague 1 (2024), l’AMF impose de nommer dès l’assemblée générale ordinaire de 2024 un commissaire aux comptes (CAC) ou un Organisme Tiers Indépendant (OTI) chargé de vérifier le futur rapport de durabilité. Cette obligation montre que l’enjeu ne se limite pas à publier le rapport en 2025, mais qu’il faut disposer dès le début de l’exercice d’un système de collecte de données et de contrôles internes solide et auditable. Anticiper la désignation du vérificateur est donc crucial pour sécuriser le processus et respecter les délais réglementaires.

Comment se préparer concrètement : L’ESRS E1 et le rôle fondamental du Bilan Carbone

Se préparer concrètement à la CSRD passe par des actions très concrètes sur le pilier environnemental. La norme ESRS E1, qui porte sur le Changement Climatique, joue un rôle central dans cette préparation. Elle impose notamment de mesurer les émissions de gaz à effet de serre (GES) et de planifier leur réduction de manière structurée.

L’ESRS E1 (Changement Climatique) : Le Cœur des Obligations Environnementales

La norme ESRS E1 est considérée comme l’une des divulgations les plus critiques en raison de l’importance du risque climatique, tant pour l’environnement que pour les finances de l’entreprise. Bien qu’elle soit soumise à l’évaluation de matérialité, il est hautement improbable qu’une grande entreprise puisse la juger non matérielle. L’ESRS E1 impose des divulgations exhaustives sur trois domaines principaux :

  • La stratégie de transition : L’entreprise doit présenter son plan de transition vers une économie durable, notamment en lien avec l’objectif de 1,5°C de l’Accord de Paris.
  • La gouvernance et les actions : Les politiques, les actions et les objectifs que l’entreprise met en œuvre pour atténuer le changement climatique.
  • La mesure des GES : La publication des chiffres d’émissions de gaz à effet de serre, couvrant les trois scopes (1, 2 et 3).

L’exigence de l’ESRS E1 d’intégrer un plan de transition crédible et des objectifs scientifiques (science-based targets) rend la simple compilation de données insuffisante. Elle nécessite une démarche stratégique approfondie, appuyée par des données fiables.

 

Le Bilan GES/Carbone (Méthode ADEME) : le prérequis technique à l’ESRS E1

Pour répondre aux exigences de l’ESRS E1, la première étape consiste à réaliser un Bilan GES complet. En France, ce processus s’appuie sur la méthodologie de l’ADEME (Agence de la transition écologique), reconnue pour sa rigueur et son exhaustivité.

Le Bilan Carbone version ADEME ne se limite pas à mesurer les émissions : il fournit le socle de données solide nécessaire pour construire un rapport de durabilité fiable et stratégique.

Concrètement, le Bilan GES réglementaire français permet de :

  • Définir précisément le périmètre : quels sites, activités et flux inclure dans l’analyse.
  • Calculer les émissions avec fiabilité : appliquer les méthodes de calcul et gérer les incertitudes.
  • Structurer la stratégie climat : passer de la simple mesure à l’élaboration d’un plan de transition et d’objectifs alignés sur votre stratégie d’entreprise.

Comparée à d’autres standards internationaux comme le GHG Protocol, la méthode ADEME se distingue par sa capacité à analyser en profondeur le Scope 3 (la chaîne de valeur), souvent responsable de la majeure partie des impacts et des risques financiers liés à la transition carbone.

Pour une entreprise française soumise à la CSRD, adopter la méthode Bilan GES (ADEME) n’est donc pas seulement une question de conformité : c’est aussi un levier stratégique. Elle garantit une base de données robuste et complète, capable de sécuriser le volet climat de votre reporting et de préparer sereinement votre ESRS E1.

Certification et assurance : garantir la fiabilité des données

La crédibilité d’un rapport de durabilité repose sur sa vérification par un organisme externe. Pour être conforme, le rapport doit bénéficier d’une mission d’assurance, réalisée par un Commissaire aux Comptes (CAC) ou un Organisme Tiers Indépendant (OTI). L’objectif ? Renforcer la fiabilité des données publiées et rassurer les investisseurs.

Concrètement, cela implique que le système de collecte de données — notamment pour les informations complexes et détaillées du Bilan GES — soit traçable, fiable et entièrement auditable. Anticiper ces contrôles en mettant en place un système de gestion robuste permet non seulement de réduire les coûts, mais aussi de garantir que le rapport sera publié dans les délais.

Le message est clair : la qualité de la mesure carbone (Bilan GES ADEME) conditionne directement la fiabilité du reporting ESRS E1, qui sera ensuite évalué par l’audit OTI. En d’autres termes, un Bilan GES solide = un reporting solide = confiance assurée.

Piloter sa transition : l’importance des outils numériques et l’appel à l’action

La conformité CSRD n’est pas qu’une question de reporting : c’est un véritable défi de gestion des données. Avec la granularité exigée par les douze normes ESRS, digitalisation et automatisation deviennent indispensables pour gagner en efficacité.

Les 4 étapes clés pour se préparer à la CSRD

  1. Évaluation d’éligibilité
    Vérifier si votre entreprise dépasse les seuils légaux (salariés, bilan 25 M€, CA net 50 M€) selon le Décret 2024-152 et les précisions de l’AMF.

  2. Analyse de double matérialité
    Identifier les enjeux prioritaires environnementaux, sociaux et de gouvernance à inclure dans le rapport. L’ESRS E1 (Climat) est quasi systématiquement jugé matériel.

  3. Collecte de données et Bilan GES
    Structurer la collecte pour les trois scopes, en s’appuyant sur la méthode Bilan GES/ADEME et les facteurs d’émission officiels de la Base Empreinte®.

  4. Préparation à l’audit
    Mettre en place des processus de contrôle interne fiables et traçables pour le CAC ou l’OTI, dont la nomination doit être anticipée dès l’AGO de l’année d’entrée en vigueur.

Pourquoi les solutions logicielles sont incontournables

Face à l’ampleur des obligations et au volume de données, les systèmes traditionnels montrent vite leurs limites. Les plateformes SaaS spécialisées deviennent alors des alliées stratégiques, transformant la contrainte réglementaire en véritable levier de pilotage ESG.

Ces outils permettent de :

  • S’assurer de l’alignement réglementaire : tous les indicateurs collectés correspondent aux exigences des 12 normes ESRS.

  • Automatiser la collecte et garantir la fiabilité : multi-sites, multi-entités, intégration directe des facteurs d’émission de la Base Empreinte® ADEME pour un Bilan Carbone conforme.

  • Sécuriser la traçabilité pour l’audit : piste d’audit complète pour l’OTI, garantissant la fiabilité des calculs et des sources.

En centralisant mesure carbone, stratégie de transition et audit externe, une plateforme intégrée offre une solution complète et sécurisée pour répondre aux exigences CSRD tout en facilitant le pilotage stratégique de la performance ESG.

Conclusion : CSRD, plus qu’une obligation, un levier stratégique

La CSRD ne se limite pas à une mise à jour du reporting extra-financier : elle transforme profondément la transparence des entreprises. Au cœur de ce changement, l’analyse de double matérialité devient incontournable, encadrée par la Directive 2022/2464 et les 12 normes ESRS.

Pour les grandes entreprises et les ETI concernées dès 2024 et 2027 (avec les seuils révisés par le Décret 2024-152), l’urgence est claire : sécuriser les données. La publication sur le changement climatique (ESRS E1) impose un Bilan GES exhaustif, y compris le Scope 3.

En France, la méthode Bilan Carbone (ADEME) représente un véritable atout stratégique. Elle assure l’exhaustivité des données nécessaires, tout en structurant un plan de transition concret, répondant aux exigences de la directive.

En résumé, la réussite de la conformité CSRD et la fiabilité de l’audit par l’OTI reposent sur la mise en place de systèmes numériques robustes, capables de gérer la complexité et la granularité des données ESG. Bien anticipée, la CSRD devient ainsi un levier pour piloter sa transition climat et renforcer la confiance auprès des investisseurs.

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Sources utilisées

Directive (UE) 2022/2464 (CSRD) – Adoptée en décembre 2022 par la Directive 2022/2464

European Sustainability Reporting Standards (ESRS) – 

GHG Protocol –