Les points clés
L’empreinte carbone mesure l’impact climatique total d’une entreprise ou d’un produit en équivalent CO², intégrant les émissions directes et indirectes. Son calcul repose sur des méthodologies fiables comme le Bilan Carbone ®, le GHG Protocol ou la norme ISO 14064, avec des facteurs d’émissions issus de la Base Empreinte®, de l’ADEME.
La réduction suit une hiérarchie claire : éviter, réduire puis compenser, en ciblant l’efficacité énergétique, la mobilité et l’écoconception. Les obligations réglementaires évoluent avec la CSRD et la CBAM, faisant de l’empreinte carbone un levier stratégique pour la transition et la compétitivité.
La neutralité carbone représente l’un des grands défis de notre décennie, en particulier pour les entreprises françaises. D’ici 2050, il s’agira de repenser en profondeur nos modèles économiques afin de limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C. Selon le GIEC, la trajectoire est claire : réduire les émissions mondiales de CO₂ d’environ 45 % d’ici 2030 par rapport à 2010, et atteindre le zéro émission nette vers 2050. Cela suppose une décarbonation profonde de l’économie, complétée par la séquestration des émissions résiduelles via des puits de carbone naturels ou technologiques.
La France engagée vers la neutralité carbone
La loi Énergie-Climat de 2019 inscrit cet objectif à l’horizon 2050. En 2023, les émissions nationales ont baissé de 5,8 %, atteignant 373 MtCO₂e contre 396 MtCO₂e en 2022 (source : Citepa). Une performance encourageante mais encore insuffisante : selon la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC), il faudrait multiplier par cinq le rythme de réduction pour tenir nos engagements.
Pour les entreprises, la chaîne de valeur, le scope 3, représente souvent 70 à 90 % du total de leur bilan carbone. Les émissions directes (scopes 1 et 2) ne constituent donc que la partie émergée de l’iceberg. D’après l’Institut I4CE, la France doit investir 87 milliards d’euros supplémentaires chaque année d’ici 2030 pour s’aligner on ses objectifs climatiques.
Qu’est-ce que la neutralité carbone ?
La neutralité carbone consiste à atteindre un équilibre entre les émissions de gaz à effet de serre générées et celles retirées de l’atmosphère. Mais cette notion a évolué, et il est essentiel de la distinguer des standards actuels plus exigeants. Selon l’ADEME, aucun acteur ne peut se déclarer “neutre en carbone” individuellement en se contentant de compenser ses émissions. La neutralité est un objectif collectif, et depuis 2023, toute communication trompeuse à ce sujet est sanctionnée par la loi Climat et Résilience.
Au niveau européen, la Commission a élargi le concept avec la neutralité climatique, qui englobe tous les gaz à effet de serre (méthane, protoxyde d’azote, etc.) et vise un équilibre global à l’échelle du continent d’ici 2050.
Neutralité carbone, Net-Zero et neutralité climatique : les différences
Ces trois notions sont souvent confondues. Voici un aperçu comparatif :
Concept | GES concernés | Approche | Niveau d’ambition | Cadre de référence |
Neutralité carbone | CO₂ | Compensation importante | Modérée | Historique |
Net-Zero | Tous GES | Réduction ≥ 90 % + élimination permanente | Très élevée | SBTi |
Neutralité climatique | Tous GES | Équilibre global collectif | Élevée | UE 2050 |
Le Net-Zero, défini par la Science Based Targets initiative (SBTi), impose une réduction d’au moins 90 % des émissions absolues sur les scopes 1, 2 et 3, puis la neutralisation des émissions résiduelles (moins de 10 %) via des technologies d’élimination permanente du carbone. C’est aujourd’hui l’approche de référence pour les entreprises ambitieuses.
Les trois périmètres d’émission (scopes)
Scope | Définition | Exemples |
Scope 1 | Émissions directes | Chaudières, véhicules d’entreprise |
Scope 2 | Émissions indirectes liées à l’énergie | Électricité, chauffage urbain |
Scope 3 | Émissions de la chaîne de valeur | Fournisseurs, transport, utilisation des produits |
Le scope 3 représente souvent la grande majorité du bilan carbone d’une entreprise, jusqu’à 90 %. Aujourd’hui, les puits naturels comme les forêts, sols et océans n’absorbent qu’environ la moitié des émissions mondiales, ce qui montre que la réduction à la source doit primer sur la compensation.
Le cadre réglementaire européen et français
Depuis juin 2021, la Loi européenne sur le climat fixe un cap clair : une réduction d’au moins 55 % des émissions nettes d’ici 2030 (par rapport à 1990) et une réduction de 90 % d’ici 2040 selon la proposition de la Commission.
Le prix du carbone européen (EU ETS) a fluctué autour de 65 à 70 €/tCO₂ en 2024-2025. Les prévisions (BloombergNEF) annoncent jusqu’à 149 €/tCO₂ en 2030. La décarbonation devient donc un avantage concurrentiel majeur.
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF ou CBAM) entrera pleinement en vigueur au 1er janvier 2026. Les importateurs de produits comme l’acier, le ciment ou l’aluminium devront acheter des certificats équivalents aux émissions de leurs produits. Un seuil de 50 tonnes/an permettra d’exempter 90 % des importateurs tout en couvrant 99 % des émissions concernées.
La Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC 3), en consultation fin 2024, vise une réduction de 50 % des GES d’ici 2030, avec de nouveaux budgets carbone. Les réductions sectorielles prévues sont de :
– 49 % pour le bâtiment,
– 35 % pour l’industrie,
– 28 % pour les transports
– 19 % pour l’agriculture.
Comment atteindre la neutralité carbone : stratégies et mise en œuvre
La méthode “Éviter – Réduire – Neutraliser” constitue la colonne vertébrale de toute stratégie Net-Zero. Elle repose sur trois étapes :
- Éviter : repenser les activités pour supprimer les émissions inutiles.
- Réduire : optimiser les procédés, électrifier les usages, recourir aux énergies renouvelables.
- Neutraliser : traiter moins de 10 % d’émissions résiduelles via l’élimination permanente du CO₂.
Depuis 2025, la version 9 du Bilan Carbone® introduit trois niveaux de maturité (Initial, Standard et Avancé) et impose un plan de transition solide. Les entreprises alignées sur la SBTi Net-Zero doivent couvrir 90 % du scope 3, avec une réduction annuelle d’au moins 4,2 % à court terme.
Les technologies et solutions clés
L’innovation et l’efficacité énergétique jouent un rôle central. L’intelligence artificielle permet jusqu’à 30 % d’économie dans l’industrie et le bâtiment. Les pompes à chaleur industrielles valorisent la chaleur fatale avec un coefficient de performance supérieur à 5. Les bâtiments intelligents réduisent la consommation d’énergie jusqu’à 40 %. Côté mobilité, l’optimisation des trajets peut diminuer les émissions de 15 à 25 %.
Entreprises pionnières : retours d’expérience
Schneider Electric vise la neutralité sur l’ensemble de sa chaîne de valeur d’ici 2050, avec un objectif d’éviter 800 MtCO₂ grâce à ses solutions numériques d’ici 2025. Capgemini s’est fixé une réduction de 90 % de ses émissions d’ici 2040, l’utilisation de 100 % d’électricité renouvelable d’ici 2025 et la réduction de 10 MtCO₂e chez ses clients d’ici 2030. Le collectif Climate Act fait de la transparence un véritable levier de compétitivité.
Financement et modèle économique de la transition
La France doit mobiliser 87 milliards d’euros d’investissements supplémentaires par an d’ici 2030. Cette transition est également créatrice d’emplois : entre 300 000 et 500 000 postes nets pourraient être générés. Le plan France 2030, doté de 54 milliards d’euros, consacre la moitié de ses crédits à la décarbonation. Le Diag Décarbon’Action propose un accompagnement pour un reste à charge de 4 000 € HT pour les PME.
Les défis structurels à surmonter
Certaines filières restent très difficiles à décarboner (acier, ciment, aviation). Les infrastructures obsolètes risquent de devenir des actifs échoués. Sur le plan social, la transition exige un besoin massif de formation et de requalification dans les métiers existants.
Conclusion : la neutralité carbone, un cap stratégique incontournable
Atteindre le Net-Zero d’ici 2050 n’est plus une option : c’est une obligation climatique, économique et réglementaire. La feuille de route est claire : éviter, réduire, et ne neutraliser qu’en dernier recours. Les entreprises qui intègrent une stratégie climat fondée sur la science renforceront leur résilience et leur avantage concurrentiel. La question n’est donc plus “Faut-il y aller?” mais “Comment accélérer dès maintenant ?”
Passez de la stratégie à l’action
Sources utilisées
Parlement européen – Qu’est-ce que la neutralité carbone et comment l’atteindre d’ici 2050 : https://www.europarl.europa.eu/topics/fr/article/20190926STO62270/qu-est-ce-que-la-neutralite-carbone-et-comment-l-atteindre-d-ici-2050
Ministère de la Transition écologique – Stratégie nationale bas-carbone : https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/strategie-nationale-bas-carbone-snbc
ADEME (Agence de la transition écologique) : https://www.ademe.fr
