Scope 2 : Comment identifier, calculer et réduire vos émissions énergétiques dans votre bilan carbone ?

Les points clés

Le Scope 2 constitue un levier stratégique pour réduire les émissions et maîtriser les coûts énergétiques, tout en exigeant rigueur et transparence selon les normes internationales et la réglementation française. L’intégration du Scope 3 et l’articulation avec le Scope 1 sont essentielles pour maximiser l’impact environnemental. Les entreprises peuvent combiner efficacité énergétique, production renouvelable et approvisionnements verts pour obtenir des retours sur investissement rapides. Les exemples français, des grands groupes aux PME industrielles, montrent qu’une réduction significative du Scope 2 est accessible dès aujourd’hui.

Le Scope 2 représente une part stratégique des émissions d’une entreprise et constitue le levier de décarbonation le plus actionnable à court terme.
Depuis janvier 2025, les nouvelles directives européennes ont modifié les exigences de reporting, avec une proposition de simplification des obligations CSRD qui concernerait désormais les entreprises de plus de 1000 salariés, contre 250 auparavant : une réforme en cours de négociation mais qui maintient les exigences techniques pour les entreprises concernées. Cette évolution réglementaire, combinée à l’objectif renforcé de -50% d’émissions d’ici 2030 inscrit dans la SNBC-3, place le Scope 2 au cœur des stratégies de décarbonation. 

Les entreprises qui maîtrisent dès aujourd’hui leurs émissions indirectes liées à l’énergie peuvent réduire leur bilan carbone de manière significative, comme le démontrent les cas de TotalEnergies qui a réduit ses émissions de Scopes 1 et 2 de 36% depuis 2015 ou d’EDF qui affiche un Scope 2 représentant seulement 0,3% de ses émissions totales.

Comprendre précisément le Scope 2 selon les standards internationaux

Le Scope 2, selon la définition officielle du GHG Protocol mise à jour en 2024, englobe toutes les émissions indirectes de gaz à effet de serre provenant de la génération d’électricité, vapeur, chaleur ou froid achetés et consommés par l’entreprise déclarante.

Cette catégorie d’émissions, distincte du Scope 1 (émissions directes) et du Scope 3 (autres émissions indirectes), présente une particularité technique fondamentale : ces émissions se produisent physiquement sur le site de production d’énergie, mais la responsabilité en incombe à l’entreprise consommatrice.

La norme ISO 14064-1:2018 classe les émissions de gaz à effet de serre en trois catégories. La Catégorie 2, qui correspond au Scope 2 du GHG Protocol, regroupe les émissions indirectes liées à la consommation d’énergie achetée, comme l’électricité ou la chaleur.

Pour mieux comprendre, même si vous ne possédez pas la source d’énergie (par exemple une chaudière collective), vous êtes responsable des émissions liées à votre consommation. La vérification par une tierce partie n’est pas obligatoire mais fortement recommandée pour garantir la fiabilité des données.

Les quatre types d’énergie concernés

Le Scope 2 couvre bien plus que la simple consommation d’électricité achetée. Il inclut quatre types d’énergie différents, chacun ayant ses propres facteurs d’émission et méthodes de calcul.

  • L’électricité : représente généralement 60 à 80% du Scope 2 dans le secteur tertiaire
  • La vapeur : dominante dans l’industrie manufacturière, pouvant atteindre jusqu’à 45% des émissions indirectes
  • La chaleur : significative pour les réseaux de chaleur urbains ou certaines industries
  • Le froid : souvent négligé, peut représenter jusqu’à 15% dans le secteur agroalimentaire et la grande distribution

L’évolution majeure du GHG Protocol 2024-2027

La révision en cours du GHG Protocol, initiée en 2024 avec une publication finale prévue fin 2027, introduit des modifications significatives. Le nouveau cadre proposé exige un alignement horaire entre la production et la consommation d’énergie renouvelable, remplaçant progressivement l’approche annuelle actuelle.

Cette évolution technique vise à montrer plus précisément l’impact réel des choix énergétiques : un certificat solaire produit en journée ne peut pas compenser une consommation nocturne. C’est comme dire que l’eau de pluie collectée en été pourrait compenser votre consommation d’eau en hiver : cela paraît possible sur le papier, mais ne reflète pas la réalité.

Les bouleversements réglementaires post-janvier 2025

Le paquet Omnibus européen : une simplification en cours d’adoption

Le paysage réglementaire européen connaît une transformation majeure avec la proposition du « paquet Omnibus » le 26 février 2025. La Commission européenne propose de réduire de 80% le nombre d’entreprises soumises à la CSRD, en élevant le seuil d’effectif à 1 000 employés et en exigeant le dépassement de l’un des deux critères financiers suivants : 50 millions d’euros de chiffre d’affaires ou 25 millions d’euros de total de bilan.

Il est important de noter que ces modifications réglementaires sont toujours en discussion au niveau européen. À ce jour, seule la directive dite « Stop-the-clock » a été adoptée le 14 avril 2025, repoussant certaines échéances de mise en œuvre de la CSRD.

Les propositions visant à relever les seuils d’application à 1 000 salariés et 450 millions d’euros de chiffre d’affaires restent en discussion et n’ont pas encore été formellement validées. L’ampleur finale de cette simplification dépendra des décisions du Parlement européen et du Conseil de l’UE, prévues début 2026.

Cette réduction du périmètre de reporting ne diminue pas les exigences pour les entreprises encore soumises à la CSRD. Le reporting du Scope 2 demeure obligatoire, conformément aux normes ESRS.

Les entreprises devront maintenir, voire renforcer, leur capacité à mesurer et justifier précisément leurs émissions indirectes liées à l’énergie, qui restent un élément central des stratégies de décarbonation.

Le décret BEGES français : l’extension au Scope 3

En France, le décret BEGES du 1er juillet 2022 marque un tournant pour le reporting carbone des grandes entreprises. Les organisations de plus de 500 salariés (250 en outre-mer) doivent désormais prendre en compte les émissions indirectes significatives du Scope 3 dans leur bilan, une évolution importante par rapport au périmètre historique qui ne concernait que les Scopes 1 et 2.

Les organisations doivent :

  • Publier leur bilan GES tous les quatre ans pour les entreprises privées (trois ans pour les entités publiques)
  • Établir un plan de transition détaillé avec objectifs chiffrés, moyens et actions
  • S’exposer à des sanctions pouvant atteindre 10 000 euros d’amende en cas de non-conformité (20 000 € en cas de récidive)
  • Publier leur bilan sur la plateforme de l’ADEME (Bilans GES)

La SNBC-3 : des objectifs climatiques renforcés

À l’automne 2025, la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC-3) est toujours en consultation publique. Cette nouvelle feuille de route climatique vise haut : réduire de 50 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, par rapport à leur niveau de 1990, contre un objectif de 40 % auparavant.

Pour atteindre ce cap, la France devra accélérer fortement sa trajectoire de décarbonation, en visant une baisse moyenne de 5 % des émissions chaque année entre 2022 et 2030, contre seulement 2 % par an en moyenne sur la période 2017-2022.

Cependant, le contexte est préoccupant : le baromètre prévisionnel indique une baisse de seulement 0,8 % des émissions en 2025, en France, suggérant un ralentissement inquiétant du rythme de décarbonation.

Dans ce contexte, le Scope 2 du bilan carbone, qui couvre les émissions indirectes liées à la consommation d’énergie, devient un levier stratégique essentiel. Le décret tertiaire impose aux bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m² une réduction de 40 % de leur consommation énergétique finale d’ici 2030, par rapport à une année de référence choisie, généralement 2010.

Méthodologies de calcul : location-based vs market-based

La méthode location-based : reflet du mix énergétique local

La méthode location-based reflète l’intensité moyenne des émissions du réseau électrique local. En France, selon RTE, l’intensité carbone moyenne du mix électrique était de 19 gCO₂eq/kWh en 2024, contre une moyenne européenne de 250 gCO2eq/kWh.

Cette méthode est obligatoire selon le GHG Protocol et permet d’évaluer l’impact environnemental global du réseau.

Cette approche reflète l’impact collectif de la demande énergétique sur les émissions du réseau, sans tenir compte des contrats ou choix d’électricité de l’entreprise. C’est comme calculer l’empreinte carbone moyenne d’un passager d’avion, peu importe s’il a acheté un billet en classe économique ou business : l’avion consomme la même quantité de carburant.

 

La méthode market-based : valorisation des choix énergétiques

La méthode market-based permet aux entreprises de valoriser leurs achats d’énergie renouvelable via des instruments contractuels spécifiques. Cette approche suit une hiérarchie stricte de facteurs d’émission selon le GHG Protocol, allant des instruments les plus spécifiques aux plus généraux :

  1. Certificats d’attributs énergétiques (Garanties d’Origine en Europe, RECs aux États-Unis)
  2. Contrats directs type PPA (Power Purchase Agreements)
  3. Taux d’émission spécifiques des fournisseurs avec certificats
  4. Mix résiduel national (émissions non couvertes par des certificats)
  5. Facteurs moyens du réseau en dernier recours

Pour être considérés comme fiables, ces instruments doivent répondre à huit critères de qualité stricts. Concrètement, cela signifie que l’énergie comptabilisée doit être récente, traçable, exclusive et transparente, correspondre au réseau utilisé par l’entreprise, et couvrir toutes les émissions concernées sans manipulation ni omission.

Exemple concret : comment les méthodes location-based et market-based diffèrent

Imaginons une PME française qui consomme 10 GWh d’électricité par an.

  • Méthode location-based : on utilise le facteur moyen du réseau électrique local (en France, 27 gCO₂eq/kWh en 2024).
    10 000 MWh × 27 gCO₂eq/kWh = 270 tCO₂e
  • Méthode market-based on prend en compte les achats d’électricité renouvelable via des certificats ou contrats spécifiques. Si 50 % de l’électricité est couverte par des certificats verts :
  • 5 000 MWh avec certificats verts = 0 tCO₂e
  • 5 000 MWh au mix résiduel = 135 tCO₂e
    Total = 135 tCO₂e

Cette différence de 50 % montre à quel point le choix des approvisionnements énergétiques peut influencer le bilan carbone. Elle souligne aussi l’importance de reportings transparents et fiables, pour refléter réellement les efforts de décarbonation et éviter tout greenwashing.

Stratégies concrètes de réduction avec retours sur investissement

L’efficacité énergétique : un levier stratégique avec un retour sur investissement rapide

L’efficacité énergétique constitue le premier pilier de toute stratégie de réduction du Scope 2, offrant des retours sur investissement particulièrement attractifs. Le passage à l’éclairage LED génère une réduction de 80% de la consommation électrique liée à l’éclairage, avec un temps de retour moyen variant entre 6 à 18 mois, selon la taille de l’installation et les coûts énergétiques locaux. Optimisation énergétique : les bénéfices d’un système de gestion technique du bâtiment (GTB) L’installation d’un système de gestion technique du bâtiment (GTB) permet une gestion centralisée et automatisée des équipements techniques, tels que le chauffage, la ventilation, la climatisation et l’éclairage. Cette approche peut générer jusqu’à 20 % d’économies d’énergie, selon l’installation existante. Le coût d’installation varie en fonction de la taille du bâtiment et de la complexité du système.  Par exemple, pour un bâtiment de bureaux de 3 000 m² en Île-de-France, l’installation d’une GTB a été estimée à 20 000 €. De plus, ces investissements sont éligibles aux Certificats d’Économies d’Énergie (CEE), permettant de bénéficier de primes pouvant couvrir une partie significative des coûts.  

Les Power Purchase Agreements (PPAs) : sécurisation long terme

Les PPAs sont des contrats long-terme d’achat d’électricité renouvelable. Ils permettent aux entreprises de sécuriser leur approvisionnement en énergie verte et de réduire significativement leurs émissions indirectes liées à l’électricité (Scope 2).
  • Ces contrats sont surtout utilisés par les grandes organisations ou celles ayant des besoins énergétiques importants.
  • Ils offrent stabilité et visibilité sur le prix de l’électricité tout en soutenant le développement des énergies renouvelables.
💡 Astuce pour les PME et entreprises de taille moyenne : même si les PPAs sont moins accessibles, il existe des alternatives plus simples comme les certificats verts ou les offres d’électricité 100 % renouvelable proposées par les fournisseurs.

La production renouvelable sur site : gagner en autonomie énergétique

Installer des systèmes de production d’énergie renouvelable directement sur site devient de plus en plus accessible et rentable pour les entreprises.

Panneaux photovoltaïques

  • Le coût moyen d’une installation est aujourd’hui compris entre 2 300 et 3 500 € par kWc, avec un retour sur investissement de 6 à 10 ans, selon la consommation et l’ensoleillement.
  • Les entreprises peuvent bénéficier du Fonds Chaleur de l’ADEME, qui peut couvrir jusqu’à 45 % de l’investissement.
Pompes à chaleur haute performance
  • Avec un coefficient de performance (COP) de 3 à 5, elles produisent 3 à 5 kWh de chaleur pour 1 kWh d’électricité consommée.
  • Elles permettent de réduire jusqu’à 75 % des émissions par rapport à un chauffage électrique direct.
  • Les projets sont également éligibles aux aides du Fonds Chaleur, pour réduire l’investissement initial.
Les principaux avantages sont multiples. Ces installations permettent : 
  • Réduction du Scope 2 : moins d’émissions liées à l’électricité.
  • Maîtrise des coûts : protection contre la volatilité des prix de l’énergie.
  • Autonomie énergétique : moins de dépendance aux fournisseurs externes.
Installer du photovoltaïque ou des pompes à chaleur n’est plus réservé aux grandes entreprises : ces solutions combinent rentabilité, efficacité et impact environnemental.

Erreurs fréquentes dans le calcul et le reporting du Scope 2

L’utilisation de facteurs d’émission obsolètes

L’une des erreurs les plus courantes dans le calcul des émissions Scope 2 est l’utilisation de facteurs d’émission obsolètes. En France, le facteur moyen pour l’électricité en 2024 s’établit à 0,027 kgCO₂e/kWh selon RTE. Pourtant, certaines entreprises continuent d’utiliser des données anciennes, ce qui peut conduire à une sous-estimation ou une surestimation de leurs émissions indirectes.

Cette erreur peut compromettre la crédibilité de toute la démarche de reporting et exposer l’entreprise à des accusations de greenwashing. Par exemple, pour une entreprise consommant 5 GWh par an, utiliser un facteur obsolète de 0,057 kgCO₂e/kWh (valeur de 2016) au lieu du facteur actuel de 0,027 kgCO₂e/kWh revient à surestimer ses émissions de plus de 100 %.

Confondre consommation brute et consommation nette

La confusion entre consommation brute et nette représente un piège technique majeur. Les entreprises disposant de production renouvelable sur site, comme des panneaux solaires, ont parfois tendance à déduire cette production de leur consommation réseau.

Or, le GHG Protocol exige de prendre en compte la consommation brute pour le Scope 2, c’est-à-dire l’électricité totale achetée sur le réseau, sans soustraire ce qui est produit sur site.

Par exemple, une entreprise qui consomme 3 GWh du réseau et produit 1 GWh sur site doit déclarer 3 GWh pour le Scope 2. La déclaration de 2 GWh (3–1) serait incorrecte.

Cette erreur peut entraîner une sous-estimation des émissions de 20 à 40 %, un problème majeur lors des audits CSRD ou des vérifications par la Science Based Targets initiative (SBTi).

En clair : la production renouvelable sur site réduit vos émissions globales, mais pour le reporting Scope 2, il faut toujours partir de la consommation brute du réseau pour rester conforme et crédible.

L’absence de transparence méthodologique

Un autre écueil fréquent dans le reporting Scope 2 est l’absence de transparence sur la méthode utilisée. Beaucoup d’entreprises ne précisent pas si elles calculent leurs émissions selon la méthode location-based ou market-based. Cette opacité rend difficile toute comparaison sectorielle et soulève des questions sur la rigueur du reporting.

Pour rester crédibles et conformes au GHG Protocol, les entreprises doivent systématiquement publier les deux valeurs lorsqu’elles opèrent dans des marchés disposant d’instruments contractuels. Elles doivent également préciser :

  • La méthodologie utilisée pour chaque calcul
  • Les sources des facteurs d’émission
  • Les hypothèses retenues (périmètre, période, etc.)
  • Les certificats ou contrats utilisés pour la méthode market-based

Les champions français de la décarbonation du Scope 2

Les géants de l’énergie : EDF et TotalEnergies en tête

Les grandes entreprises françaises montrent que réduire significativement les émissions indirectes liées à l’électricité (Scope 2) est non seulement possible, mais aussi économiquement viable.

EDF : un modèle de décarbonation

En 2024, EDF a réduit ses émissions de Scope 2 à 0,3 % de ses émissions totales, grâce à une stratégie d’approvisionnement quasi-exclusivement décarbonée. Cette performance est le résultat d’une augmentation de la production décarbonée, notamment grâce à la hausse de la production nucléaire en France et à l’effet de sobriété observé sur la consommation d’énergie.

TotalEnergies : une transition énergétique ambitieuse

Depuis 2015, TotalEnergies a réduit ses émissions de Scope 1 et 2 de 36 %, dépassant ses objectifs initiaux. En 2024, l’entreprise a investi 5 milliards de dollars dans les énergies bas-carbone et a signé des contrats d’approvisionnement en électricité renouvelable pour ses sites de Port Arthur et Laporte. 

La grande distribution : Carrefour et Auchan montrent la voie

Les leaders français de la grande distribution, Carrefour et Auchan, illustrent que la décarbonation du Scope 2 est non seulement possible, mais aussi économiquement viable.

Carrefour : une trajectoire ambitieuse validée par la SBTi

Carrefour s’engage à réduire ses émissions de Scope 1 et 2 de 50 % d’ici 2030 par rapport à 2019, et de 70 % d’ici 2040, conformément à une trajectoire compatible avec un réchauffement de 1,5 °C validée par la Science Based Targets initiative (SBTi)

En 2022, l’entreprise a déjà réduit ses émissions de Scope 1 et 2 de 29 % par rapport à 2019, grâce à des actions telles que :

  • La modernisation des systèmes de réfrigération avec des fluides frigorigènes bas-carbone.
  • Le déploiement massif du photovoltaïque sur les toitures de ses hypermarchés.
  • L’optimisation de l’éclairage avec un passage systématique au LED.
  • L’utilisation de 100 % d’électricité renouvelable d’ici 2030, en privilégiant la production sur site et les contrats d’achat d’énergie (PPAs)

     

Auchan : une stratégie d’autonomie énergétique réussie

Auchan a réduit ses émissions liées à la consommation énergétique de 50 % en 2024, grâce à sa filiale Auchan Renewable Energy (ARE), qui alimente une part croissante de ses magasins en énergie verte autoproduite.

Cette stratégie d’autonomie énergétique est rendue possible par :

  • L’installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures de ses magasins.
  • La gestion centralisée de l’énergie via ARE, permettant une optimisation des achats d’énergie et une réduction des coûts.

Cette approche démontre qu’une stratégie d’autonomie énergétique est viable même dans la grande distribution, contribuant à la réduction des émissions de Scope 2 et à la maîtrise des coûts énergétiques.

Les PME et l’industrie : des performances remarquables

Les PME et ETI françaises montrent que la décarbonation du Scope 2 n’est pas réservée aux géants de l’énergie ou de la distribution. L’expérimentation ACT menée par l’ADEME sur 30 entreprises révèle que 66 % d’entre elles ont défini des objectifs de réduction des Scopes 1 et 2 avec des plans d’action sur trois ans, obtenant une note moyenne de 8B+, soit 8/20 au score chiffré et une performance globale jugée « B+ », traduisant une stratégie engagée mais encore perfectible. Ces résultats témoignent d’ambitions à la fois réalistes et exigeantes.

Dans le secteur manufacturier, les progrès sont tout aussi impressionnants : entre 1990 et 2022, l’intensité des émissions a diminué de près de 45 %. Cette réussite s’explique par des investissements massifs dans l’efficacité énergétique et la récupération de chaleur fatale, prouvant que la décarbonation industrielle peut aller de pair avec la compétitivité économique.

En résumé, les petites et moyennes entreprises ainsi que les industriels français montrent que réduire ses émissions Scope 2 est à la fois possible et rentable, même hors des grands groupes.

L’articulation entre Scopes pour une vision globale

Penser le Scope 2 de manière isolée peut être une erreur stratégique majeure. En effet, les Scopes 1, 2 et 3 sont interconnectés, et certaines stratégies de réduction d’un Scope peuvent avoir des effets sur les autres.

Par exemple, l’électrification des processus, souvent utilisée pour réduire le Scope 1, entraîne mécaniquement une augmentation du Scope 2, qui doit être anticipée et compensée par des approvisionnements décarbonés.

Renault illustre parfaitement cette approche systémique. L’électrification de sa gamme de véhicules permet de réduire les émissions de Scope 3 aval (l’usage des véhicules par les clients), tout en générant une hausse temporaire du Scope 2 de ses sites industriels. Cette hausse est compensée par un objectif ambitieux de réduction de 80 % des émissions de ses sites industriels entre 2019 et 2030.

L’exemple de Renault montre qu’une stratégie de décarbonation efficace nécessite une vision globale, prenant en compte toutes les interactions entre les Scopes pour maximiser l’impact environnemental.

Le Scope 3 : l’éléphant dans la pièce

Le Scope 3, qui représente en moyenne 75 % des émissions totales d’une entreprise selon le CDP (cdp.net), joue un rôle clé dans les stratégies de réduction du Scope 2. Certaines catégories, comme les pertes de transport et de distribution d’électricité (Scope 3, catégorie 3), peuvent ajouter 5 à 8 % supplémentaires aux émissions calculées du Scope 2.

Pour être efficace, la réduction des émissions doit être coordonnée à l’échelle de la chaîne de valeur. Schneider Electric illustre parfaitement cette approche : via son Zero Carbon Project, impliquant plus de 1 000 fournisseurs, l’entreprise a réussi à réduire de 40 % les émissions opérationnelles de sa chaîne de valeur d’ici 2024, dépassant son objectif initial de 27 %.

Réduire ses émissions Scope 2 sans prendre en compte le Scope 3, c’est passer à côté de l’effet multiplicateur qu’une stratégie intégrée peut offrir.

L’évolution réglementaire vers une approche globale

Depuis le 1er janvier 2023, le décret n°2022-982 rend obligatoire l’intégration des émissions du Scope 3 dans le bilan d’émissions de gaz à effet de serre (BEGES) des entreprises françaises de plus de 500 salariés en métropole ou 250 en outre-mer. 

Cette évolution réglementaire marque un tournant vers une vision globale de la décarbonation, incitant les entreprises à ne plus considérer le Scope 2 isolément. Les organisations les plus avancées publient désormais des objectifs différenciés par Scope, mais coordonnés dans une trajectoire globale de neutralité carbone.

Cette approche intégrée reconnaît que réduire un Scope au détriment d’un autre ne fait que déplacer le problème. Par exemple, délocaliser sa production pour réduire ses Scopes 1 et 2 augmente mécaniquement le Scope 3 amont, sans bénéfice climatique réel.

Conclusion

Le Scope 2 est aujourd’hui au cœur des stratégies de décarbonation, permettant aux entreprises de réduire leurs émissions tout en maîtrisant leurs coûts énergétiques. En 2025, la réglementation (BEGES) et les standards internationaux exigent rigueur, transparence et intégration du Scope 3 pour que chaque action ait un impact réel. Investir dans des systèmes de mesure précis, des approvisionnements en énergie renouvelable et des programmes d’efficacité énergétique permet non seulement de se conformer aux obligations, mais aussi de générer des économies et de renforcer la résilience opérationnelle. Les exemples français, d’EDF à Carrefour en passant par les PME industrielles innovantes, montrent qu’une réduction significative du Scope 2 est possible dès aujourd’hui, avec des retours sur investissement concrets et des bénéfices pour l’image de marque. Agir maintenant, plutôt que subir les réglementations, c’est anticiper les standards de demain et maximiser l’impact de chaque euro investi dans la décarbonation.

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Sources utilisées

ADEME – Base Carbone : https://www.bilans-ges.ademe.fr/

ADEME – Méthodologie BEGES : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/methodo_BEGES_decli_07.pdf

INSEE – Enquête sur les consommations d’énergie dans l’industrie : https://www.insee.fr/fr/statistiques/8574661

Ministère de la Transition écologique – Décret BEGES juillet 2022 : https://www.ecologie.gouv.fr/presse/decret-bilan-emissions-gaz-effet-serre-beges

Service-Public.fr – LOI n° 2025-391 du 30 avril 2025 (DDADUE5) : https://entreprendre.service-public.fr/actualites/A18249